• Je range mes affaires à côté de mes manuels de science quand une tête blonde surgit de nulle part :  

    — Oooh Ulysse ça faisait longtemps ! Je te cherchais, qu'est-ce que tu fais là ? Demande Camryn. 

    — Je suis avec mon amie là, on se retrouve plus tard si ça te dérange pas... je lui marmonne en jetant un coup d'œil furtif en direction d'Hélia.  

     Camryn se rapproche de moi, la main cachant sa bouche en chuchotant :  

    — Mais... tu sais qu'elle aime les filles pas vrai ? Je te rends service crois-moi.   

    — Arrêtes avec tes conneries ! je m'exclame.  

    Hélia sursaute, Camryn aussi. Je sens mon cœur battre si fort que tout le monde doit sûrement l'entendre aussi. Mes joues chauffent, mes sourcils sont froncés et je serre les poings. Elles sont toutes les deux étonnées de ma réaction. Je continue de plus belle.  

    — Tu prétends toujours qu'on est amie mais c'est faux ! Tu m'as abandonnée au moment où j'avais besoin d'une amie ! J'étais à l'hôpital mais tu es partie ! Hurlé-je.  

    Un cercle d'élèves commence à se créer autour de nous, les gens n'osent pas intervenir mais prennent plaisir à assister à ce spectacle. Les Cam's débarquent avec leurs talons hauts et leurs cheveux éclatants. Elles agrippent Camryn pour former un mur contre moi.  

    — Haha, elle est bonne ! Tu devrais t'améliorer en blagues Ulysse, ce n'est vraiment pas drôle. Dit-elle en me rigolant au nez.  

    Elle est en train de me ridiculiser devant tout le lycée réunit. Pourtant elle sait très bien que ce que je dis est véridique. Je n'ai pas le temps de riposter, elles sont déjà en train de s'éloigner. Je regarde autour de moi les visages d'inconnus qui me dévisagent. Je suis face à un barrage me séparant de ma seule amie. Alors que je ne suis plus capable de bouger, une main se pose sur mon épaule. J'entends les murmures de l'assistance. "Je suis sûre qu'elle est lesbienne", "mais non elle a tout révélé au lycée pour Camryn, elle est l'une de ces pestes". Je n'en peux plus, que quelqu'un les fasse taire !  

    — Ya rien à voir par ici ! Et garder vos commentaires pour vous, je connais Ulysse, elle n'est pas comme ça ! Dit la personne qui se tient derrière moi.  

    Ne vient-il pas de...ce n'est pas possible...il l'a dit, ma prédiction...Je me retourne comme une flèche. Sans le vouloir je trébuche, mes pieds s'emmêlent et je sens mon corps basculer. Je ferme les yeux. Je me ridiculise encore plus.   

    La chute n'est pas douloureuse, je sens comme une pression sur ma taille, une caresse dans mes cheveux. Lorsque j'ouvre les yeux, je suis face aux magnifiques yeux bleus de Peter me portant dans ses bras. Alors c'est lui, celui qui aura alors mis fin au suspense... Je peux lire dans l'avenir.  

    Peter me pose à terre tandis que les élèves commencent à s'éloigner. Hélia s'empresse de me tenir par la main de peur que je ne retombe.  

    — Ça va ? Rien de cassé Ulysse ? Me demande-t-il, sourire aux lèvres.  

    — Oui...enfin je crois... Je n'avais pas besoin de ton aide ! Lui crié-je à la figure.  

    Son visage s'assombri. Je l'ai vexé, mais je ne suis vraiment pas d'humeur à remercier les gens aujourd'hui. Il lâche un long soupir et nous quitte en faisant une petite tape sur l'épaule d'Hélia, comme pour marquer son soutien. Il ne reste personne dans le couloir, tout le monde sait maintenant que je suis une folle alliée. Nous décidons de passer l'après-midi en ville avec Hélia pour décompresser. De toutes façons, nous n'avons pas d'examens en ce moment avec l'arrivée des vacances. J'ai pu me réconforter en achetant un sandwich du  Bouldin Creek Cafe. Nous avons longuement discuté, tout en évitant de mentionner ce qu'il venait de se produire au lycée.  


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  • — Tu es sûre que tu ne veux pas parler de ce qu'a dit Peter ? M'interroge mon amie.  

    —  Je sais...il a dit la fameuse phrase. Je prédis l'avenir, houra ! Dis-je ironiquement en levant les poings vers le ciel.  

    — C'est probablement très difficile pour toi à vivre mais je pense qu'il faut qu'on continue nos recherches... et aussi.. Qu'on se rapproche de Peter.  

    — Quoi ? Hors de question qu'on devienne amies avec ce mec ! Hélia, après tout ce qu'ils t'ont fait ! Je proteste. 

    — Ce n'est pas lui qui m'a harcelée, je te l'ai dit ce sont les Cam's. Il a pris ta défense, donc au fond il n'est pas si méchant que ça.  

    Elle a raison, comme toujours. Je me contente de lui adresser un timide sourire avant de reprendre la dégustation de mon sandwich. Heureusement, ce détail a pu égailler ma journée qui n'a pas du tout bien commencé, tout se fini bien quand je suis avec elle. Je me lève de la banquette sans un mot et je l'enlace. Nous ne nous touchons pratiquement jamais avec Hélia, pourtant nous sommes très proches.  

    Il est plus de dix-neuf heures, il faut qu'on rentre. Nous sortons du restaurant pour rejoindre notre ligne de bus. 

    — Oh Ulysse ! J'avais oublié de te demander, tu comptes te déguiser pour la fête d'Halloween ce week-end ? Me demande-t-elle enjouée.  

    — Mince ! J'avais complètement zappé cette foutue fête... Je ne sais pas et toi ?  

    — J'aurai aimé faire un déguisement coordonné avec le tien, une sorte de duo. Ça te dit ?  

    — Oui bien sûr ! 

    Le week-end suivant nous nous sommes alors réunies avec Hélia pour confectionner nos costumes avant la fête. En réalité, ils étaient déjà prêts et impeccables quand je franchis la porte de la chambre. Elle avait acheté deux anciennes robes bouffantes des années cinquante et des rubans pour les cheveux assortis.  

    — Nous serons déguisées en demoiselles d'époque ! Je n'avais pas d'inspiration pour faire un costume effrayant alors je me suis dit qu'on pourrait se démarquer avec ça. Me dit-elle presque gênée.  

    — C'est parfait ! Lui dis-je en sautant dans ses bras. Nous serons superbes !  

    Nous nous sommes mises d'accord sur la distribution des robes. Hélia allait porter la verte pâle et moi la rose. La fête se déroule chez l'un des garçons de l'équipe de foot, Camryn m'avait invitée avant le drame au lycée, heureusement nous savons que tout le lycée y est convié, c'est une sorte de bal d'Halloween. Tous les élèves sont présents, déguisés et déjà à moitié bourrés. Nous nous enfonçons dans la foule de zombies et de sorcières aux doigts ensanglantés, il y a une chouette ambiance pour une fois. Les rideaux sont tous déchirés et parsemés de toiles d'araignées artificielles. C'est plutôt réussi, exceptés le fait que la tarentule mesure plus d'un mètre de long. Hélia et moi sommes plutôt coquettes au milieu des autres, même si nos costumes ne sont pas particulièrement effrayants, ils font l'affaire. La musique est de bon goût, je reconnais le DJ, c'est Sammy, l'un de mes camarades en cours de maths, pas très bavard mais mignon avec ses tâches de rousseurs et ses cheveux blonds bouclés. Je me mets à danser tout en le regardant. Hélia part se chercher à boire, un soda, pas d'alcool pour nous, mes parents sont très stricts par rapport à ça. Il y a longtemps j'ai eu le droit de goûter une gorgée de vin rouge, j'ai détesté. Sammy fini par me remarquer et m'adresse un timide sourire qui en dit long. Jackpot ! Tandis que je tente de me frayer un chemin vers les platines, un gros bruit retenti soudainement près du bar. Je regarde le sol se couvrir de soda. Des piles de gobelets en plastiques se sont effondrées par terre et tout le monde commence à s'écarter de la table où étaient disposés il y a encore cinq minutes les multiples petits fours et apéritifs. Camryn est de l'autre côté de la pièce, morte de rire et pointant son doigt vers moi. Que se passe-t-il ? Je sens une main se poser sur mon épaule. En une fraction de seconde je me retourne brusquement en me dégageant de cette emprise. C'est Sammy.  

    — Ça ne va pas Ulysse ? Tu sais ce qui se passe au bar toi ? Me demande-t-il.  

    — Heu... non... je ne sais pas trop. Marmonné-je, gênée d'être aussi près de lui.  

    Il se met à rire. Il pose soudainement sa main sur ma joue et se rapproche lentement de mon visage. Ses yeux plongent dans les miens, je me perds dans leur bleu intense et la profondeur de leurs reflets azur. Je n'ose pas bouger, ce mec est quand même canon ! Je parviens tout de même à détourner le regard un instant en direction de la table renversée. J'y vois ma meilleure amie, encerclée par les garçons de l'équipe de foot excepté Peter que je n'ai pas vu de la soirée d'ailleurs... Je repousse de toutes mes forces Sammy qui semble étonné qu'une fille puisse résister à son charme, je n'ai pas le temps pour ça, pas ce soir. J'accours aux côtés d'Hélia, couverte de soda et morte de honte. Elle a une entaille sur le long de son mollet droit, elle saigne beaucoup. Personne ne semble le remarquer. En levant les yeux, je me retrouve paralysée face à tous ces gens. Je ne sais pas quoi faire. Est-ce à cause de la honte que cette situation peut me procurer ou est-ce la colère qui bouillonne en moi soudainement ?  

    — Qu'est-ce que vous foutez ? Vous ne pouvez pas l'aider au lieu de vous moquer comme toujours ? Vous êtes sacrément cons ! m'écriai-je.  

    Aucune réponse, seulement des regards insistants en direction de mes atouts féminins. J'en ai assez, je brandis le bras de mon amie et commence à l'accompagner vers la sortie quand soudain les portes de la terrasse s'ouvrent violement. Peter fonce dans le tas de footballer, enchaînant les coups de poings. Il a le visage rouge, les sourcils froncés. Ses yeux ont cependant une lueur triste, comme si tout cela le rongeait de culpabilité. Il enfonce avec acharnement son pied dans le ventre d'un joueur avec rapidité tout en réceptionnant un coup au visage. Je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi enragé. Les garçons aux blousons rouges finissent par s'écarter, trop amochés pour riposter. Mais d'où lui vient une telle force ? Seul contre quatre et il ne les a pas loupés... Ce n'est pas possible. Peter se tient devant nous, penchés en avant, se soutenant à ses genoux pour ne pas vaciller. Il a un bleu en visage et son nez saigne.  Personne ne cause, le temps semble s'être arrêté. La lumière s'intensifie tout à coup, une forte lumière blanche pénètre dans la pièce et ma vision se brouille. Je ne vois plus rien à part la silhouette de notre sauveur. Je ne sens plus le bras d'Hélia entre mes doigts. Je m'avance vers lui d'un pas hésitant, et si tout le monde était en train de nous regarder ? Mais il n'y a personne. Peter se redresse et s'avance. Il déploie ses bras pour me prendre dans ses bras et m'enlace tendrement. Je me blottis contre son torse, j'entends les battements de son cœur qui s'emballe. Lorsque je lève le nez pour le regarder, ses lèvres se posent sur les miennes doucement. Il glisse ses mains en bas de mon dos et retire ses lèvres des miennes. Il me regarde, souriant. Je lui souris aussi, je ne sais pas pourquoi.  

    — Ulysse.... chuchotte-t-il.  

    La lumière devient plus vive, je ferme les yeux. On les ouvrant, je ne suis plus blottie contre lui mais à l'entrée de la maison avec le bras d'Hélia dans mes mains, pleurant. C'était une vision... mais pourquoi celle-ci ?


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  •  Chapitre 3. Dis-moi   

    Ce soir-là je n'arrive pas à dormir. Ma tête est en ébullition. Je suis dans mon lit, Hélia est sur le matelas gonflable à côté de moi. Elle dort profondément. Pour me vider l'esprit je décide de prendre mon carnet et d'écrire ce qui s'est passé.  

    Cher journal...  

    Je suis surprise de me mettre à rédiger comme ça, généralement je transcris mes sentiments à l'aide de poèmes que seule moi peut comprendre mais je ne parviens pas à commencer par autre chose que cette phrase.  

    Cher journal, aujourd'hui je me suis trouvée au bord du vide. Assise entre deux chaises comme on dit. Mon esprit et mon cœur se disputaient entre eux, comme deux enfants auxquels on aurait donné un seul jouet pour s'amuser. Je n'ai rien contrôlé ni décidé...J'ai subi une vision plutôt perturbante où j'étais embrassée pour la première fois de ma vie par un garçon que je ne connais pas plus que ça et.... 

    Hélia se retourne sur elle-même et lâche des petits rires étouffés par sa couverture remontée jusqu'à son nez, elle doit faire un rêve amusant. Je me sens observée tout à coup. Je sens une pression dans mon dos mais elle est invisible. Je respire un grand coup et je m'avachis dans ma chaise. Le ciel est d'un noir profond dans lequel seules quelques étoiles scintillent. Je saisis mes genoux contre ma poitrine. Recroquevillée sur le siège je repense à cette soirée, ces gens, ce lycée. Pourquoi tout doit se passer si mal ?  Je ne comprends pas comment les gens fonctionnent, j’ai peut-être un problème avec les adolescents de mon âge...   

    Je ne ferme pas l’œil de la nuit. Le lendemain matin nous nous rendons en cours avec Hélia, la boule au ventre. J’ai peur pour la première fois de ma vie d’aller dans ce long couloir. Est-ce par rapport aux crétins de la fête d'Halloween ou à Peter ? Non, je ne dois pas penser à cette vision absurde ! Tandis que j’avance d’un pas incertain en direction de ma salle de classe je le vois à l’autre bout du couloir prendre ses livres à son casier. Il a encore des bleus au visage et sa main droite est recouverte de bandages. Je suis maintenant presque à côté de lui, je le fixe sans m’en rendre compte. Alors que je fais mine d’ouvrir mon casier pour prendre quelque chose, je peux entendre sa respiration qui s’accélère. Il semble nerveux. J’ose poser les yeux sur lui tout à coup. Mon regard se pose sur le sien, comme des aimants. Ses yeux bleus sont toujours aussi magnifiques. Ses joues sont légèrement plus rosées que d’habitude et ses bleus créent une sorte de dégradé violacé sur ses pommettes. Il ouvre la bouche comme pour s’apprêter à dire quelque chose mais il n’en a pas le temps, la sonnerie retentit et il se contente de fermer brusquement son casier tout en continuant à me fixer et s’en va.  

    Les jours passent. Je croise Peter dans tous les couloirs s’en avoir la force d’aller lui parler. Lui non plus ne fait pas vraiment d’efforts pour m’adresser un signe de la main ou un sourire le matin. Nous sommes devenus étrangers l’un de l’autre. A la cafétéria je le vois à sa table avec les Cam’s et les joueurs de foot qui se sont vite reconciliés. Cette bagarre n’aura rien changé. Ils forment toujours le groupe parfaitement intact des populaires du lycée. Hélia me surprend toujours à les observer lui et Camryn, elle sur ses genoux, lui avec ses mains posées sur ses hanches de nouvelle capitaine des Cheerleaders aux formes sexy. Lorsqu’ils s’embrassent c’est comme si ma vision était une claque que je me prenais en plein fouet. Je ne réussis jamais à les regarder après ça. Les choses sont identiques, comme à la rentrée, il y a deux mois, sauf que maintenant il fait plus froid et le ciel n’est plus aussi bleu. Je passe mes week-end devant ma baie vitrée à regarder les feuilles tomber des arbres qui se dorent. Je ne sors pratiquement plus de chez moi, je ne vais pas chez Hélia. Quelques fois seulement, je pars en balade faire un jogging, la musique à fond dans mes oreilles. J’ai besoin de me dépenser. Je ne me sens bien nulle part, ma chambre me rappelle trop ma vie, le lycée me rappelle mes échecs et ma meilleure amie me rappelle malgré elle que je ne suis pas à la hauteur en tant que pote... Lorsque je cours, je suis seule face à mes problèmes que je fuis littéralement à la force de mes jambes. Aujourd’hui je me suis pratiquement perdue dans la forêt alors je suis rentrée tard et mes parents ne se sont même pas inquiétés. Je suis devenue un fantôme sans savoir pour qu’elle raison.  

    Lundi matin, je suis avec Hélia dans le bus. J’ai mes écouteurs aux oreilles tandis qu’elle lit un livre, “Hamlet” de Shakespeare. Elle sait que je ne vais pas bien et qu’il ne faut pas me parler dans ce genre de situation mais nous restons tout de même ensemble, liées à jamais contre tous. Le bus tente de se garer dans le parking du lycée quand il freine brusquement, comme chaque matin... Ce sont encore, sans surprise, les athlètes du lycée dans leurs blousons rouges qui nous barrent la route sur leurs vélos et leurs skates, la musique à fond jaillissant de leurs enceintes hightech. Alors que je me lève de mon siège pour sortir du véhicule une main toque sur la fenêtre à côté de moi. Peter se tient en dessous de moi sur son skate me faisant signe de le rejoindre.  


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  • Je jette un regard vers Hélia.  

    — Va s’y me dit-elle. Il faut que tu lui parles.  

    Je me contente d’hocher la tête et je sors du bus. Peter se tient devant le panneau d’affichage. Il me regarde arriver le visage neutre. J’ai l’impression d’aller à la rencontre d’un inconnu.  

    — Salut... dis-je timidement 

    — Salut.  

    Un blanc s’installe, personne n’ose parler. Je ne vois pas ce que je pourrais dire puisque c’est lui qui m’a demandé de le rejoindre, pourtant j’ai l’impression de devoir dire quelque chose par moi-même.  

    — Alors... tu voulais me dire quoi ? Demandé-je un peu plus sûre de moi. 

    Il se passe la main dans les cheveux, il est nerveux comme souvent ces derniers temps. Il porte le blouson d’hiver du lycée, un jean noir un peu large, des baskets blanches. Ses cheveux ont pas mal poussé depuis la rentrée, ses cheveux commencent à boucler aux pointes et sa barbe est mal rasée.  

    — Je voulais qu’on s’explique par rapport à Halloween... Je sais que je ne me suis pas contrôlé ce jour-là et je voulais simplement te dire que je m’excuse que tu m’aies vu comme ça. Dit-il en fixant l’horizon sans me regarder. Je peux voir une lueur de remord dans ses yeux.  

    — Oh... pas de problème, t’inquiète c’est déjà oublié ! Dis-je gentiment.  

    — Tu as oublié ?  

    Il pousse un ricanement, un ricanement qui sonne faux.  

    — Me fais pas croire que cet incident n’a rien changé Ulysse ! S'écrit-il en se tournant vers moi, ses yeux  désormais rivés sur moi.  

    Pourtant c’est le cas, ce n’est pas sa crise de rage qui a bouleversé mon quotidien ! S'il savait... 

    — On sait bien tous les deux ce qu’il s’est vraiment passé... Me chuchote-t-il tout en s’approchant de moi. 

    Il pose sa main sur mon épaule, je peux sentir son autre main prendre la mienne. Il colle son front contre le mien, je n’ose pas bouger et pourtant je me sens remplie d’une hystérie sans nom.  

    — Ça ne te rappelle pas quelque chose ? Murmure-t-il dans mon oreille calmement.  

    Ses lèvres effleurent les miennes, il me sourit et sans un bruit, retire ses mains et reprend son skate qui était à terre. Je suis immobile. Lorsque je reprends finalement conscience de mon état je sens mes joues brûler, je respire fort et je sens encore la pression de son étreinte sur ma peau. Je le suis sur le trottoir longeant le parking. Je ne détache pas mon regard de son dos. Alors qu’il s’apprête à passer la porte principale, il se retourne une dernière fois vers moi et me regarde avec insistance. Cette fois-ci c’est clair, Peter est différent, il a vu ma vision ! Je dois tout de suite voir Hélia !  

    Je n’ai pas cours d’histoire avec elle aujourd’hui car M.Lovergrant s’est absenté. Je passe la matinée en cours d’espagnol puis de maths... Je n’arrive pas à me concentrer. C’est tout de même fou... Je viens de trouver une preuve que nous ne sommes pas les seules à vivre ses expériences paranormales ! A l’heure du déjeuner, alors que je sors de ma salle de classe, je reçois un SMS de mon amie.  

    Ulysse, je suis désolée mais je dois faire un truc de midi, ça te dérange ?   

    Je lui réponds que ce n’est pas un problème. Je soupire cependant... j’aurais aimé lui annoncer cette nouvelle au plus vite. Le reste de la journée est banal, j’assiste à mes deux derniers cours de la journée et je rentre chez moi. Hélia finit une heure plus tard que moi donc je lui parlerai demain.  

    Je ne pourrais pas lui en parler le lendemain. Nous n’avons eu aucun cours en commun et elle n’a toujours pas pu rester avec moi pour le déjeuner. Heureusement nous nous sommes échangé quelques messages hier soir pour raconter notre journée. Je ne lui ai même pas parlé du baiser avec Peter. Je suis censée me réjouir avec ma meilleure amie de ce genre de choses comme dans les films avec du pop-corn devant un film non ? Ou pas, c’est trop cliché pour nous. Ce n’est pas grave, j’ai seulement besoin de me dépenser pour extérioriser et ne pas me laisser consumer par tous les récents évènements. En plus, cerise sur le gâteau, ma mère a commencé à acheter des décorations de Noël... Ce n’est pas comme si cette fête était dans plus d'un mois... Du coup le week-end nous allons avoir les traditionnels ateliers de loisirs créatifs sur la table de la salle à manger avec Matty et mon père qui se contentera de se moquer de mes boules à neige ratées. Je comprends maintenant pourquoi mon professeur de sport ne cesse de me féliciter pour mes récents dons en volley-ball, j’ai vraiment une boule de feu en moi que je dois expulser de mon corps alors frapper dans une balle et faire des smatchs c’est dans mes cordes. Aujourd’hui nous devons constituer des équipes de quatre. Les garçons sont séparés des filles, je n’ai jamais compris pourquoi puisque nous sommes dans l’enceinte d’un lycée, pas aux Jeux Olympiques.


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  • Je me retrouve avec une Cam’s, une fille que je ne connais pas et qui semble ne pas apprécier cette activité sportive et enfin une fille du club de volley-ball du lycée... Nous n’allons pas aller loin avec cette équipe, nous ne sommes que deux à jouer face à quatre autres élèves qui semblent motivés à nous massacrer. Alors que je me positionne au milieu du terrain je jette un coup d’œil du côté des garçons. Ils sont bien plus forts. Les équipes sont homogènes comme la plupart font déjà partie d’un club sportif. Soudain je repère une chevelure rousse et bouclée traverser le terrain numéro trois et sauter tellement haut que mes yeux n’ont pas le temps de suivre ses mouvements. Peter est vraiment rapide... Je continue de le regarder quelques instants, il a une telle force et rapidité, ce n’est pas humain. Je me demande si... Aie ! Je m’étale par terre violemment. J’avais oublié que je me trouvais moi aussi sur le terrain. L’une des filles de l’équipe adverse cours jusqu’à moi.  

    — Pardon je suis désolée ! Je pensais que vous étiez prêtes ! S'excuse-t-elle presque sanglotant. Elle s’en veut beaucoup trop mais c’est adorable. Cela me rappelle Hélia...  

    — Oh non ne t’inquiète pas. Lui dis-je en me relevant difficilement, je suis un peu sonnée tout de même.  

     Je jette un furtif regard autour de moi pour vérifier si ma chute monumentale est passée inaperçue ou non... Malheureusement, Peter se tient à deux pas de moi, lui aussi s’était précipité pour me relever... Je le regarde sans un mot. Il se met à marcher à reculons tout en continuant à me regarder et se retourne au dernier moment reprenant son match comme si de rien n’était. Il joue avec mes sentiments comme avec cette balle de volley, la balayant du terrain puis en la rattrapant au vol comme un jouet. Il sort avec Camryn, il ne faut pas que je me laisse attraper, les règles sont établies et je ne dois pas les enfreindre.  

    En sortant des vestiaires des filles je décide d’appeler Hélia sur son téléphone pour que nous nous rejoignions pour déjeuner. Par miracle je tombe sur sa voix et non son répondeur, elle m’attend devant son casier me dit-elle. Je me mets subitement à courir sur le béton de l’allée joignant le gymnase au premier bâtiment du lycée. Cela fait tellement longtemps que je veux lui parler de tout ce qu’il s’est passé et j’ai besoin de ma meilleure amie en cette période de doute. Malgré mes courbatures et mon niveau sportif peu effectif, je parviens à rejoindre le couloir principal rapidement. Lorsque je pousse la lourde porte vitrée je peux l'apercevoir refermer son casier. Je continue de courir dans sa direction mais je me rends compte qu’elle n’est pas seule... Elle se retourne vers une fille à la peau mate aux longs cheveux bruns bouclés et volumineux. Elle a de magnifiques yeux verts et des sourcils épais. Son sourire est parfait. Elle porte un pull aux motifs ethniques, un jean beige avec des dizaines de poches et des bottines en cuir vieillies par le temps. Ses poignets sont recouverts d’une multitude de bracelets semblables à celui d’Hélia qui était apparu dans notre vision. Qui est cette fille au juste ? Est-ce avec elle qu’elle passait son temps, me laissant seule ces derniers jours ? Non, Hélia n’est pas du genre à me laisser tomber pour quelqu’un d’autre. Je m’ôte toute jalousie de la tête et me contente d’aller à leur rencontre.  

    — Salut ! Dis-je à mon amie dans son dos.  

    Elle sursaute et se retourne aussitôt. Elle ne porte plus ses lunettes et je peux voir qu’elle s’est maquillée aujourd’hui. Un petit peu de mascara et un fin trait d’eyeliner ornent ses yeux bruns. Elle a cependant gardé son serre-tête, son accessoire fétiche mais a abandonné son style strict pour un col roulé en laine gris et une jupe moulante noire lui donnant un air plus branché. J’ai l’impression d’avoir manqué quelque chose.  

    — Oh Ulysse ! Alors que penses-tu de mon nouveau look ? C’est Démethys qui m’a conseillé d’acheter ses vêtements quand nous sommes allées ensemble faire les boutiques ! S'écrie-t-elle, excitée par ce changement.  

    — Oui ! Je trouvais que ça lui allait bien ! Je suis Démethys, ravie d’enfin te rencontrer, cela fait longtemps qu’Hélia me parle de toi sans que je puisse mettre un visage sur ton nom. Me dit la belle brune en me tendant la main. 

    Je lui prends la main et lui adresse un grand sourire. Elle semble honnête et différente des personnes de ce lycée, j’ai déjà plus ou moins confiance en elle. Nous nous asseyons toutes les trois à une table de la cafétéria. Je me rends compte que je ne vais pas pouvoir me confier en toute liberté aujourd’hui à cause de Démethys, je ne suis pas proche d’elle et je n’ai pas envie de parler de Peter en sa présence, qui sait ce qu’elle pourrait raconter... Hélia semble avoir remarqué quelque chose, je constate qu‘elle me fixe, les sourcils froncés et le regard inquiet.  

    — Tu voulais qu’on parle de quelque chose Ulysse ? me demande-t-elle. 

    — Heu oui... mais....  

    — Vous voulez peut-être que je m'en aille ? Propose Démethys.  

    — Oh non ce n’est pas nécessaire ! On en parlera dans le bus ce soir d’accord Hélia ?  

    — Non ! Si je t’ai demandé de me rejoindre c’était pour qu’on parle ! Depuis la fête d'Halloween tu ne te confies plus, tu as pris tes distances ! J’aimerai te raconter une histoire tu veux bien ? Me demande-t-elle.  


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  • — Il y a deux semaines, le lendemain de la fête d'Halloween, je me suis rendue à la bibliothèque pour faire des recherches pour un exposé sur les forces mystiques. J’ai passé des heures à feuilleter les bouquins sans rien trouver. Alors que j’étais sur le point de rentrer chez moi, quelqu’un m’a interpellé. C'était Déméthys. Elle avait renversé une pile énorme de livres et elle n’arrivait pas à tous les ramasser.  Je l’ai donc aidée et nous avons commencé à discuter toutes les deux sur des poufs autour d’une table recouverte d’ouvrages sur la botanique et les animaux. C’est comme ça que notre rencontre s’est déroulée. Par la suite nous nous sommes rendues compte que nous étions dans le même lycée. Nous n'avions aucun cours en commun mais nous profitions des intercours pour discuter. A cette période-là, tu ne parlais plus beaucoup Ulysse, tu t’étais isolée, même de moi ! Alors je me suis rapprochée de Dém’ quand tu n’étais pas là... Au fil du temps, nous nous sommes rapprochées, j’ai passé des pauses déjeuner avec elle et puis...  

    — Et puis quoi ? Lui demandé-je 

    — Et elle m’a parlé du club et de tout ce qu’il y a autour.. Prononce Déméthys soudainement.   

    Je les fixe l’une après l’autre sans comprendre ce qu’elles essaient de m’avouer. Elles sont gênées pour une raison qui m’échappe.  

    — Ulysse je lui ai raconté nos rêves. Déclare Hélia, le regard dirigé vers le sol, n’osant plus me regarder. Je sais que tu ne veux pas en parler aux gens mais Déméthys nous comprend je te l’assure.  

    Mes poumons se bloquent, je n’arrive plus à respirer tout à coup. Je n’arrive pas à le croire. Comment a-t-elle pu me faire une chose pareille ? Je sais que cette histoire est idiote, que nos rêves sont peut-être une illusion en laquelle nous aimons croire telles deux enfants naïves mais cela représente tellement pour nous. Hélia le sait, elle sait tout de moi et elle vient délibérément de donner cette particularité à une inconnue que je ne connais pas ! Je ne peux pas rester là, je sens la chaleur monter à mes joues, je sens mes muscles se raidir, je ne veux pas refaire les mêmes erreurs, je ne veux pas retourner à l’hôpital, je ne veux pas la blesser. Non, non, non ! Je commence à trembler, je fixe les murs de la cafétéria, je ne peux pas poser les yeux sur elle, impossible. Contrôle toi Ulysse ! J’essaie de prendre mon sac calmement mais mon bras ne m’écoute pas, je le brandis violemment. Je me lève brusquement de ma chaise provoquant un bruit beaucoup trop fort et je me précipite vers la porte menant à la cour arrière. Tout le monde me regarde, je ne me retourne même pas lorsque Hélia hurle dans mon dos, me demandant de l’attendre. Je m’en vais car ma colère ne va pas tarder à me consumer et je ne veux pas que mon amie me voie comme ça ! Les larmes commençaient tout juste à s’échapper de mes yeux lorsque je percute un élève en sortant de cet enfer. Je ne prends pas le temps de m’excuser et continue de marcher. Cependant, la personne me prend par le bras et me tire vers elle.  

    — Tu pourrais t’excuser s’il te plait ? Me dit-il 

    Il s’agit d’un grand blond aux cheveux ébouriffés portant un bonnet bordeaux et des lunettes. Ses sourcils épais et plus foncés renforcent son air contrarié. Je sens une forte pression autour de mon avant-bras, il a de la force. Je n’ai pas le temps de me battre avec lui. Je commence à ouvrir la bouche pour lâcher une insulte prise au hasard dans ma tête mais il se met à rire. Il lâche mon bras et me regarde en souriant.  

    — Tu verrais ta tête ! Dit-il toujours en se marrant. T’inquiète-je plaisantais. Bon, salut madame malpolie !  

    Je le regarde s’éloigner, agitant sa main au-dessus de sa tête pour me dire au revoir. Ce garçon me laissa bouche bée, je n’ai absolument pas compris sa blague... Pourtant, au fond de moi, cela m’a permis de m’apaiser.  

    Je passe la suite de la journée à me demander si je ne devrais pas rester un peu seule, quelques jours ou semaines, sans Hélia. C’est vrai qu’elle est importante à mes yeux mais je ne peux pas me reposer que sur une seule personne. Il faut que je profite de cette pause pour me retrouver avec des visages nouveaux. Je redresse la tête soudainement. Mais oui ! Je pourrais tenter de retrouver cet étrange garçon de tout à l’heure, il avait l’air sympa ! En plus, j’ai remarqué qu’il portait des vêtements de skate, chose que j’ai toujours voulu tester. Je me lève de mon siège et je me mets à déambuler dans le lycée. C’est la pause, la plupart des élèves sont maintenant dans le hall d’entrée. En poussant la porte d’entrée je l’aperçois assis sur l’une des tables en béton fixées au sol située sur la petite mezzanine surplombant la gigantesque pièce aux couleurs du lycée, rouge et blanche. Il est entouré d’un groupe de personnes, toutes très différentes. Il y a une fille aux cheveux multicolores, des gothiques, d’autres skateurs... Je me sens ridiculement anodine à côté d'eux, sans personnalité ni style. Mais bon, je tente tout de même le coup. Je fais quelques pas pour m’assoir sur un siège tout près du blondinet. Je les écoute discuter tout en faisant mine de chercher quelque chose dans mon sac.  

    — Arrête de raconter des conneries, on sait tous qu’Hermione craque sur Harry dans ce film ! S'exclame la fille aux cheveux colorés.  

    — N’importe quoi... soupire l’un des garçons. Tu ne crois pas que l’amitié homme-femme existe toi ?  

    Ils se mettent tous à rigoler. Décidément je ne comprends rien à l’humour... 


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  • L’un des garçons, accompagné d’une partie de la bande, s’en va prendre le bus. Il ne reste plus grand monde mais il est toujours là, lui, assis à côté de cette fille à la crinière de poney arc-en-ciel. Je les vois rigoler tous les deux, ils semblent assez proches. J’ai un pincement au cœur en les voyant, je me mets à penser à Peter... Stop Ulysse ! Oublies-ça. En reprenant mes esprits je me rends compte qu’ils ne sont plus devant moi. Mince, j’ai loupé mon occasion !  

    — Tu pouvais venir me parler directement tu sais ! Me dit quelqu’un par-dessus l’épaule tout en posant sa main sur ma tête en ébouriffant mes cheveux.  

    — Eh ! Qu’est-ce que tu fais ?! Crié-je en me retournant, à moitié en train de rigoler. Je sais très bien qu’il se trouve derrière moi, c’est bien son genre.  

    Il s’assoit à côté de moi. La fille n’est plus là. Je le fixe un instant. Il a une petite barbe et des yeux bleus à tomber qui se cachent derrière les verres de ses lunettes. Il est encore plus mignon de près...  

    — Je t’ai vue roder autour de nous petite cachotière... dit-il en me taquinant et en entourant mes épaules de son bras. On peut dire qu’il est tactile...Mais ça ne me dérange pas.  

    — Je n’ai jamais été très douée pour me faire des amis.  

    — Pourtant je suis ton ami maintenant pas vrai ? Aller vient ! Je vais te montrer un endroit du lycée que tu ne connais sûrement pas ! Me propose-t-il tout excité.  

    Je décide de le suivre. Nous marchons l’un à côté de l’autre, rigolant à des blagues stupides et chantonnant les dernières notes d'un morceau du groupe Arctic Monkeys, mon préféré.  

    — Au fait ! Comment tu t’appelles ? Lui demandé-je. 

    — Je me demandais quand tu allais me poser la question Ulysse ! Ricane-t-il.  

    — Tu connais mon nom ?  

    — Bien sûr... murmure-t-il en souriant dans son écharpe.  

    Nous arrivons à bon port. Le skate-park du lycée. J’en avais oublié l’existence, en même temps il est isolé de tout.  Je cours en haut de la structure tandis que mon ami inconnu s’échauffe sur sa planche. Je le regarde pendant une demie heure enchaîner les figures. C'est assez impressionnant.  

    — Tu veux essayer madame la malpolie ?  

    J’explose de rire, c’est le pire surnom qu’on m’ait donné ! Je le rejoins et je monte sur la planche. Je m’appuie sur ces épaules et nous commençons doucement à rouler. Au bout de quelques mètres je parviens à le faire toute seule. Ce n’est pas si compliqué finalement.  

    — Si tu réussis à faire le tour du skate-park, je te dirais mon prénom ! Me dit-il.  

    D’accord, pari lancé ! Je m’élance sur la planche, je parviens à rouler sur la première ligne droite, il faut maintenant que je tourne... Pas très facile mais j’y arrive. Je suis maintenant au troisième virage. Je sens que je m’y prends bien pour une débutante, mais alors que je prends appuis pour incliner la planche, celle-ci dérape sur le béton. Je m’étale par terre. J’entends le bruit de ses chaussures frapper le sol pour accourir jusqu’à moi.  

    — Rien de cassé ? Me demande-t-il inquiet. Il me saisit par la taille et pose sa main sur ma cuisse.  

    — Ça va, je suis plus coriace que j’en ai l’air ! Dis-je avec un petit rire.  

    — Tu mérites alors de m’appeler Eldiorn désormais. 

    Il me relève à la force de ses bras. Décidemment, je suis comme une poupée que tous les garçons aident à se relever. Toujours la main autour de mes épaules, il me fait monter sur le skate de nouveau mais cette fois-ci il ne marche pas pour m’apprendre à rouler... Sans que je puisse réellement reprendre mes esprits suite à ma chute, Eldiorn me vole un baiser. Mais pas un simple baiser, un vrai avec tout le bazar qui va avec ! Ses mains qui caressent mon dos, les miennes qui retirent son bonnet pour les passer dans sa chevelure et nos lèvres qui ne séparent plus. Je ne sais pas si c’est une bonne idée d’embrasser quelqu’un que je connais seulement depuis aujourd’hui mais je m’en fiche, il sera mon erreur de parcours ou bien un raccourcit vers le bonheur.  

    J’ai le souffle court. Nous nous sommes pelotés pendant de longues minutes, moi en équilibre sur la planche et lui tentant de me soutenir, mais ce moment de pur plaisir est terminé. Nous nous regardons comme deux enfants venant de faire une bêtise, c’est jouissif.  

    La semaine suivante, je passe mon temps seule à écrire sur mon carnet que je prends maintenant au lycée. Cependant je sais qu’à chaque fois que la sonnerie retentira, je retrouverais mon petit copain dans les couloirs du bahut et je ne serais pas gênée de le montrer au reste du monde. Eldiorn me permet de me sentir normale, de vivre ce que n’importe quelle lycéenne vivrait dans un lycée si elle n’avait pas des visions ou des rêves mystérieux, cela me fait du bien de me sentir comme les autres. Je n’ai toujours pas réglé mon problème avec Hélia... Je la croise parfois, elle et Demethys. Elle m’adresse toujours un timide sourire, comme pour s’excuser encore une fois. Concernant Peter, je ne lui ai pas reparlé non plus. A vrai dire, depuis que je suis en couple il se contente de me regarder du coin de l’œil ou de regarder Eldiorn avec mépris quand je suis dans ses bras. Il est jaloux c’est évident, mais c’est comme ça...  


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  • Je me trouve dans le hall d’entrée, comme à mon habitude. J’attends mon copain pour aller déjeuner. Mon carnet ouvert dans mes mains, je réfléchis à une nouvelle idée de poème pour mon cours d’anglais de cet après-midi. Ce qui est bien quand on a plus d’amis, c’est qu’on a du temps pour travailler. L’ensemble de mes notes sont remontées et les profs l’ont remarqué. J’accumule les félicitations de ces derniers. D’ailleurs je revois M.Lovergrant aujourd’hui, cela faisait pas mal de temps que je n’avais pas eu d’entretient avec lui, c’est plutôt bon signe ! Tandis que je m’apprêtais à débuter un croquis pour illustrer mon futur poème, je vis Déméthys s’approcher de moi. Elle n’est pas avec Hélia.  

    — Salut ! Me dit-elle 

    Je ne répondis pas, faisant mine de ne pas avoir entendu. Je fixe mon crayon, je ne sais pas quoi dire. Je n’ai rien à dire à lui dire à elle !   

    — Écoutes, je sais que tu n’es pas d’humeur à nous parler mais... Elle lâche un lourd soupire avant de poursuivre. On trouve que tu as exagéré. Déclare-t-elle, toujours en me regardant.  

    Je lui jette un regard froid. Oui, j’ai sûrement dépassé les bornes en quittant le réfectoire comme une furie mais j’ai bien le droit de penser qu’il s’agit d’une trahison. 

    — Je n’ai pas de temps à perdre avec des lâcheuses. Hélia m’a déçue, et toi.... Je ne t’ai jamais appréciée. Dis-je sèchement.  

    Je mens, au fond Dem’ est sympa et elle n’a jamais rien dit de méchant à mon égard ou à propos de qui que ce soit. C’est trop difficile pour moi de pardonner, c’est tout. Je n’ai jamais été douée pour exprimer ce que je ressens en parlant. Je le fais au travers d’un poème ou d’un dessin, pas à l’aide de longs discours. C’est à ce moment-là que l’idée me vint, celle de dire ce que j’ai sur le cœur à ma meilleure amie : je vais lui faire un poème. Déméthys se mit à soupirer de nouveau. De toutes évidences elle n’a pas l’habitude de régler les conflits entre amis. Elle dépose un paquet à côté de moi avant de partir, m’adressant un regard désolé. Je pris le cadeau entre mes mains. Le papier est de couleur lilas, aux motifs arabesques argentés, il est aux couleurs de mon collier. Hélia me connaît si bien... Sur le ruban est accroché une étiquette en carton avec écrit mon nom en italique. Je détache les rubans et découvre mon présent. Je n’en reviens pas ! C’est magnifique ! Dans ce petit paquet était caché un collier, mais bien différent de celui que j’ai reçu dans notre rêve. Il est long, la chaine est argentée et plus fine. À son extrémité est accroché un pendentif d'ambre. Il est magnifique ! Je sais que mon amie affectionne beaucoup les pierres, les cristaux et tout ce genre de choses. Elle voit en elles une sorte de force énergétique. Une fois, lorsque je suis allée pour la énième fois dans son appartement, j’avais trouvé une boite où elle y stockait toutes ses collections de pierres et cristaux, l’une d’elle m’avait beaucoup plu... C’est cette ambre. Je sentis à cet instant une vague de nostalgie balayer mon ventre de sentiments anciens. Sur ma peau, un petit filet de larme s’écoulait. Hélia me manque... Je dois la pardonner, je vais apprendre à le faire pour une fois dans ma vie !  

    Je me précipite jusqu’au bureau de M.Lovergrant. Plus tôt j'aurai passé ce rendez-vous, plus tôt je pourrais écrire mon poème et le réciter en guise de retrouvailles. Je traverse le long couloir du rez-de-chaussée et fini par arriver devant la porte en bois sombre de mon professeur principal. Alors que je levai la main pour toquer, je l’entendis parler à voix haute.  

    — Il faut absolument que je mette la main sur ce fichu pnévma... mais comment....  

    Je perdis mon appui sur ma jambe et mon poignet se cogna contre la porte. Il se tu. Je respirai un bon coup. J’ouvris directement la porte, de toutes façons il m’a entendue. Je le découvris debout devant son bureau, les cheveux en bataille, la barbe mal rasée et les lunettes de travers, tout est comme au premier jour ! Cette vision me fit rire. Je lâchai un gloussement indiscret ce qui le fit détourner le regard depuis son bouquin jusqu’à moi.  

    — Je peux t’aider Ulysse ? Me demanda-t-il surpris.  

    — oh...et bien... nous avions une entrevue aujourd’hui, je me disais que nous pouvions le faire maintenant mais vous semblez occupé alors... 

    — Non ! S'écria-t-il, lui même surpris d’un tel décibel provenu de sa bouche. Il s’éclaircit la voix. Non...assieds-toi Ulysse. Me dit-il en me montrant le siège de la main.  

    Je m’installais confortablement sur le fauteuil en face du sien.  

    — Je dois aller chercher quelque chose dans la salle de professeurs, je reviens !  

    Me voilà seule dans le bureau. Je n’avais jamais eu l’occasion de regarder ce que M.Lovergrant faisait. En fait, il ne gère pas beaucoup de classes, il n’a que la nôtre d’ailleurs... C’est étrange.  


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  • Le bureau déborde de bibelots et de livres. On ne distingue pas directement la couleur du papier peint à cause des étagères et des affiches qui ornent les murs. Le bureau est recouvert de paperasse, de pots à crayons et de manuels d’histoire ouverts. M.Lovergrant a également la fâcheuse habitude de laisser ses mugs entamés sur le bord des meubles de rangement. Il possède également une table basse et deux fauteuils dont l’un est occupé par mon popotin. Je me permets de me lever pour jeter un coup d’œil à tout ce bazar. La bibliothèque d’un professeur d’histoire n’est pas très passionnante... Manuels, encyclopédies, ouvrages sur l’Antiquité, le Moyen-Âge... Oh ! Il possède lui aussi des pierres, je peux reconnaître une ambre similaire à celle de mon collier. Dans un coin de la pièce se trouve une grande malle. Elle est ouverte. A l’intérieur ne se trouvent pas des livres d’historien mais des recueils de nouvelles, des ouvrages plus littéraires. Cependant, en regardant bien, je peux distinguer un carnet à la couverture abimée, comme s’il venait du passé. Je le pris délicatement, regardant la porte pour vérifier si le professeur ne revenait pas déjà de son excursion dans les couloirs du lycée. Heureusement pour moi, aucun bruit de pas ne parvient à mes oreilles. J’ouvre alors le petit carnet. Je pensais y trouver de longs récits rédigés à la plume comme à l’époque mais il s’agit d’un carnet de croquis... Sur la première page se trouve le portrait d’une dénommée Esmée, gardienne des Ames Déchues du monde de Daxus. Elle est magnifique. Je m’assis sur le fauteuil pour le feuilleter. Je parcours les pages. Dedans sont dessinés les paysages de ce monde inconnu, dans lequel spiritisme et rêve se mêlent pour ne faire qu'un. Cela s’appelle le ygró... Qu’elle est cette langue au juste ? Ce n’est pas du latin, peut-être du grec ? Je sens soudainement un air chaud dans mon cou. 

    — Alors comme ça on fouille dans mes affaires ?  

    Je pousse un cri. En sursautant je fis tomber le carnet et me retrouve par terre. La honte, même un tueur en série aurait rigolé. Je finis par me relever malgré la douleur dans ma hanche. M.Lovergrant se tenait derrière moi, mais depuis combien de temps ? Je ne l’ai pas entendu...  

    — Ulysse je suis désolée ! Je ne pensais pas te faire aussi peur... De plus je ne peux pas faire le bilan avec toi aujourd’hui... On vient de me prévenir que je dois aller gérer une classe ! Dit-il anxieux. On dirait que je vais devoir faire cours cet après-midi exceptionnellement... 

    — D’accord ! Ce n’est pas grave ! Aurevoir ! Dis-je en me précipitant pour sortir de la pièce. Il m’a vraiment fait peur ! Quel genre de personne fait ça sérieux ! Il est vraiment trop bizarre.  

    Ouf ! La journée est enfin terminée. Mince ! Je n’ai pas pris la référence du carnet. Peut-être existait-il plusieurs éditions de ce carnet de croquis... Pas grave, je pourrais toujours demander à M.Lovergrant de le lui emprunter. Sur le trajet du bus, la musique à fond dans les oreilles, je me mis à repenser à la déesse Esmée. J’ai pu lire à côté de son portrait qu'elle soulage les Ames Déchues avec ses mots, qu’elle leur chante des sortes de berceuses pour les guider vers la paix... c’est poétique comme approche pour parler de la mort. Mon bus parvient finalement à mon arrêt. Le soleil est déjà couché, je suis partie tard du lycée... mais personne ne s’inquiète pour moi à la maison. Cette année ma mère doit bosser trois fois plus dur pour obtenir une promotion, elle monte dans les grades donc la compétition est plus dure. Papa lui, voyage pas mal. Il doit se rendre fréquemment à Austin pour suivre une formation. Je n’en parle pas souvent mais mes parents sont brillants, dans le genre “chercheurs de renommé” ils sont les rois. Ma mère travaille dans le domaine de la biologie et mon père est archéologue. Je sais, ça parait super cool dit comme ça mais du coup, ils passent beaucoup de temps le nez plongé dans les bouquins, où assis devant leurs bureaux. J’ai droit à un exposé sur les cellules souches ou à propos des poteries antiques à chaque dîner. Et ne parlons pas des discussions lorsque mes parents invitent des collègues pour l’apéritif, un bourrage de crâne intensif et atroce.  

    Je franchis le portail de mon jardin. Le sapin de la cour a été décoré d’une guirlande lumineuse. Ça y est, Maman a commencé les décorations de Noël... Je sortais les clés de ma poche lorsque j’entendis une voix.   

    — Ulysse ! Cria quelqu’un. 

    Je me retournai en direction de mon portail, les yeux plissés. Il fait pratiquement nuit et ma rue n’est pas éclairée à cette période de l’année. Je me dirige vers la personne. Il ne me faut pas beaucoup de temps pour comprendre qu’il s’agit de Peter. Son blouson rouge est la première chose que l’on voit.  

    — Qu’est-ce que tu fais là ? Tu pourrais prév.... 

    — J’ai quitté Camryn. Dit-il en me coupant la parole.  

    Il me regarde, tout sourire, comme s’il m’annonçait que le vaccin contre le cancer avait été trouvé.  

    — Et donc ? Lui demandé-je.  

    — Oh Ulysse... tu sais bien que y’a un truc entre nous, et ce n’est pas ce... Comment il s’appelle déjà ce skateur... Elion ?  

    — C’est Eldiorn pour être exact. Dit une voix au ton protecteur.  

    Je reconnais la voix de mon copain provenant du porche de ma maison. Je sens que cette situation va être compliquée pour moi...  


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  • Chapitre 4. Guide-moi 

     Plus personne ne prononce un mot. Le silence s’est abattu sur nous soudainement. Je me trouve dans une position délicate, située entre Peter et Eldiorn qui se fixent mutuellement. Peter est assez calme, il a toujours eu confiance en lui et il semble plutôt se soucier de ma réaction suite à son annonce de rupture avec Camryn. Eldiorn, quant à lui, le transperce du regard. Il commença à marcher en notre direction, sans quitter son adversaire du regard. Arrivé à ma hauteur, il brisa la glace à la force de sa voix :  

    — Maintenant que les présentations ont été faites, tu peux partir. Dit-il froidement.  

    Je me tournai vers lui. Eldiorn n’a jamais été méchant avec qui que ce soit. Je ne le reconnais pas.  

    — Je n’ai pas d’ordre à recevoir de la part d’un inconnu. Si je veux parler à ta copine, elle seule peut me demander de partir ! S’écria Peter en ouvrant le portillon de mon jardin pour venir jusqu’à nous.  

    Eldiorn enroula son bras autour de mes épaules et me serra contre lui. Il se pencha près de mon oreille.  

    — Dis-lui de partir si tu en as envie... me chuchota-t-il calmement.  

    Je n’avais pas le choix, je ne pouvais pas demander à Peter de rester alors qu’Eldiorn était chez moi.  

    — Peter, je te demande de partir. Dis-je. 

    Celui-ci me lança un regard étonné. Il y avait également quelque chose dans ses yeux qui avait changé à cet instant. Il sera le poing et se retourna muet. Je l’ai blessé. Nous le regardions quitter mon jardin et refermer le portillon. Je me mis à trembler, j’avais oublié que nous étions désormais en Décembre, qu’il faisait nuit et que j’étais littéralement en train de geler sur place. Eldiorn retira son sweat et le mit sur mes épaules. C’est fou, j’ai un copain digne des films d’amour pour adolescents !  

    Nous décidâmes de rentrer au chaud. En refermant la porte, Eldiorn déposa un doux baiser sur mon front avant de me prendre la main. Nous allâmes dans la cuisine pour prendre à manger. Ma mère débarqua à ce moment-là :  

    — Vous allez manger dans ta chambre ? Me demande-t-elle avec un sourire au coin des lèvres qui en disait long.  

    Je soupire, essayant de contenir un rire gêné. Je me tourne vers elle, un bol de popcorn dans les mains.  

    — Oui, on pensait regarder un film. Ça pose un problème ?  

    — Oh que non ! S’exclama mon père depuis le canapé. Cependant... continua-t-il en se levant, j’aimerai que ce soit clair.... 

    Eldiorn déglutit et regarda mon père impressionné.  

    — Ne brise pas le cœur de ma petite Ulysse d’accord ? Lui dit-il soudainement, l’attrapant chaleureusement par les épaules.  

    Tout le monde se mit à rigoler de soulagement. Eldiorn pris deux cannettes de soda dans le réfrigérateur et nous montâmes à l’étage. Il était impressionné par ma famille. À peine entré dans ma chambre, il se mit à me conter à quel point nous étions formidables et soudés. S’il savait... Puis il s’installa sur mon lit, l’ordinateur sur les genoux.  

    — Tu as beaucoup de chance tu sais.. Me dit-il.  

    — Pourquoi ? Parce que ma mère est gentille pour une fois et que mon père t’a accueilli les bras ouverts ? Tu sais, ce n’est pas la réalité.  

    — Oui mais tu as une famille, ou du moins ce qu’une famille est censée être ! Ulysse, je sais que ce n’est peut-être pas une évidence pour toi mais crois moi, tu as de la chance !  

    Il se mit à regarder par terre et retira son bonnet. Je sentais que quelque chose n’allait pas.  

    — Tu peux te confier à moi... Ecoute, je sais que ça fait qu’une semaine qu’on sort ensemble et qu’on a encore beaucoup de choses à savoir l’un sur l’autre... Je me mis à penser à mes pouvoirs de prédictions, mes rêves, toutes ces choses qu’il ne sait pas encore de moi. Mais, tu peux tout me dire... lui dis-je.  

    Il se leva tout à coup et me pris dans ses bras. Je sentis ses larmes dans mon coup et sa respiration s'accélérer. Je pris son visage entre mes doigts et l’embrassa. Il continuait à pleurer mais je sentais les battements de son cœur se ralentir. Je l’entrainai sous la couette. Nous étions blottis l’un contre l’autre dans la pénombre de mon étroite chambre. Je profitai de cet instant pour poser ma tête dans le creux de son épaule et il passa son bras autour de ma taille.


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